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14/05/2014

Equinoxe 0 %

Pauvres de nous ! Plus qu'un mois à profiter du printemps, saison délicieuse mais ô combien restrictive, ensuite ce sera le moment d'enfiler notre maillot de bain

C'est bien joli le printemps. On s'émerveille, la nature se réveille, le soleil réchauffe nos carcasses endolories, mais est-on bien conscient de tout ce que cela implique ?
En Corse, terre bénie des Dieux, la douceur du climat pousse les habitants à se dévêtir durant la saison chaude. A Dunkerque, un col roulé, en Corse, un maillot de bain.
Cela suppose un certain nombre d'obligations: un corps mince, un corps musclé, un corps bronzé. Il n'est pas envisageable d'arriver à la plage avec un corps gras, flasque et blanc. C'est réservé aux touristes.

 Si comme moi, durant l'hiver, vous avez pris de copieuses collations essentiellement composées de canistrelli,  l'angoisse doit être en train de vous étreindre.

A l'issue de la morte saison, impossible de rentrer dans le joli petit jean tout léger qui nous allait si bien. Plus possible de faire un pas sans tomber sur un magazine proposant de nouveaux régimes permettant de perdre 5-kgs-en-une-semaine-en-mangeant-tout-ce-que-je-veux à part peut-être Philosophie magazine.

 "Fi des régimes ! L'essentiel est d'être bien dans sa peau." s'insurgera-t-on. Cet adage ne peut prendre tout son sens que si l'on habite loin d'une station balnéaire, dans le cas contraire, il est caduque.

Le printemps, dans certaines régions, est avant tout synonyme de cruelles privations et d'inscriptions à la piscine.
Ici, les clubs de gym ne désemplissent pas, le Dr Dukan a triplé son chiffre d'affaire et il faut réserver des mois à l'avance pour faire une séance d'UV.

Les corps parfaits des gens dans ma tranche d'âge, (le tout début de la quarantaine) me laissent toujours dubitative. Quand on sait les efforts et surtout le temps que cela demande, on peut s'interroger sur la capacité de ces personnes, absolument tournées vers leur plastique, à ouvrir un livre. Peut-on lire Kant durant une séance d'abdo-fessiers ?

Ils pourront se rattraper à la plage ! m'objectera-t-on. Certes, mais alanguis sur leur serviette, ces gens-là ont plutôt tendance à lire Voici, Closer ou Marc Levy.

Oh les vils clichés ! N'existe-t-il donc pas des personnes soucieuses de leur alimentation, sportives par goût et non par nécessité, aimant cultiver leur esprit, qui exhibent un peu malgré elles, leur silhouette flatteuse le moment venu ? Oui ! Mais comme je les jalouse, je ne veux pas en parler.

D'ailleurs, une pomme et je file. J'ai piscine.

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02/05/2014

Un grand-père

Pépé Paglieta (prononcez Paillet'a), surnommé ainsi parce qu'il ne quittait jamais son chapeau de paille, n’ôtait jamais non plus son costume clair bien qu''il résidât au village.

Pépé Paglieta s'était marié très jeune, contre sa volonté, et contre celle de sa promise,  avec Annonciade, une femme laborieuse et taillée pour l'effort. Jamais ces deux là ne s'aimèrent et avec le temps, en vinrent à se détester. 

 Paul aimait faire la fête. Annonciade, le jardin. Ils se croisaient souvent au petit matin, elle, une bêche à la main, lui, une bouteille sous le bras, vestige de sa nuit loin d'elle.

 Il lui fit 5 enfants, il fallait bien assurer la descendance, et s'y intéressa peu. Il n'était pas fait pour la vie rude du village, travailler la terre lui faisait horreur. Sa pension de guerre lui permit de ne jamais suer au dessus des sillons. Une tuberculose providentielle eut l'heur de se déclarer la veille de sa montée au front. Il y aurait laissé la vie, il y perdit un poumon.

 Alors que rien ne le présageait, il manifesta beaucoup d'intérêt envers ses petits enfants, principalement quand ceux-ci devinrent adolescents. Ce qu'il aimait par dessus tout, c'était leur prodiguer des conseils de séduction. Il leur expliquait comment plaire aux femmes, leur conseillait d'ôter jeans et t-shirts au profit d'un beau costume qu'un vieux tailleur d'Ajaccio pourrait leur confectionner.

 Il les mettait en garde contre l’homosexualité, un fléau qui, selon lui, touchait la jeune génération. De son temps à lui, ces choses-là ne se faisaient pas. Il en parlait souvent et n'hésitait pas à se montrer cru afin de choquer les jeunes esprits des adolescents qui l'écoutaient amusés. Lui qui aimait tellement les femmes, ne pouvait comprendre qu'un homme puisse être attiré par un autre.

 L'été avec ses amis, il écumait les bals de village ! Excellent danseur, il avait un succès fou. Les femmes faisaient la queue pour avoir l'honneur d'une danse avec Paul.

 Il les entrainait dans des valses qui les laissaient étourdies. Au petit matin, il rentrait, ivre d'alcool et de bonheur. Il croisait alors Annonciade, la mine maussade qui s'en allait biner les tomates.

Après la belle saison, l'ennui le gagnait. Fort heureusement, il s’était pris de passion pour les cures thermales. Il s'y rendait chaque année, grâce au poumon qui lui restait et qui n'était guère vaillant. Ces cures annuelles, lui donnaient l'occasion de quitter son village, où l'hiver, il ne se passait rien, et de faire de savoureuses rencontres.

 A Saint-Honoré-les-Bains, il devint rapidement l'ami du maire d'un petit village du sud de la France, venu prendre les eaux avec sa femme, et n'eut pas grand effort à faire pour devenir l'amant de cette dernière, la délicieuse Berthe. Comment aurait-elle pu résister aux roucoulades de Pépé Paglieta, susurrant des "Berrrrrthe" enflammés dans le creux de son oreille ?

 Quand le couple achevait sa cure, Pépé Paglieta la poursuivait car Marthe le rejoignait alors. Cette veuve bretonne, blonde dans sa jeunesse, grande et fessue à souhait, le comblait au delà de toute espérance. Comme elle était loin, la brune et besogneuse Annonciade ! Comme il serait toujours temps de la retrouver !

 Au retour pépé Paglieta était épuisé et se montrait fort peu enjoué. Les joies de Saint-Honoré-les-Bains n'étaient plus qu'un souvenir qui le faisait sourire dans l'obscurité de sa chambre, et puis il vieillissait. Alors qu'Annonciade continuait de cultiver son jardin, sarclant ses pieds de tomates avec ardeur, Pépé Paglieta rongeait son frein dans un lit d'où il sortait de moins en moins.

 L'année suivante, très affaibli, il ne put aller en cure. Sa maladie pulmonaire avait gagné du terrain. Il prit soin de prévenir ses chères Berthe et Marthe de son absence. " Berrrrrthe (Marrrrrthe) je ne pourrrrai pas venirrrrr cette année " leur annonça-t-il avec tristesse.

 L'agonie de pépé Paglieta ne fut pas longue. Annonciade, toujours consciente de son devoir, le soigna jusqu'à la fin.

 Le jour de son enterrement, la maison était pleine de monde. Les gens venaient se recueillir une dernière fois devant la dépouille de pépé Paglieta (toujours vêtu d'un costume mais noir cette fois-ci) et présenter leurs condoléances à la famille.

 Comme les personnes parlaient du défunt autour d'un café, Annonciade, en grand deuil, s'approcha de la fenêtre où quelque-chose avait attiré son attention et s'exclama:

 " Mi, chi ci hè un ghjattu rossu in i pumati ! (Oh, il y a un chat roux dans les tomates !)

 

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25/04/2014

Lopigna, paese affiziunatu

Certains corses sont originaires de Pigna, Corbara, Erbalunga, Patrimonio, Piana ou Monacia d'Aullène. Moi, mon village, c'est LOPIGNA. Qu'est-ce qui aurait pu être pire ? Peut-être avoir ses racines à Oradour sur Glane.

Pour les pinzuti qui ne connaissent pas la Corse, et pour tous les corses qui ne connaissent pas Lopigna (et ils sont nombreux), c'est un petit village de Corse du Sud situé dans la vallée du Cruzzini-Cinarca à environ 45 km d'Ajaccio. L'hiver, une centaine d'habitants ("des vieillards sans âge qui regardent passer la vie"), l'été le double. Quand on demande à un lopignais de quel village il est et qu'il donne la réponse, celle-ci est en principe suivi d'un silence. Puis d'un "D'où ? " Puis d'un "C'est où ça ?"

Si l'on recherche la tranquillité, Lopigna est l'endroit idéal. Si en plus, on habite à la sortie du village, on peut passer des semaines sans croiser âme qui vive. "Oh, tu viens d'arriver au village ? "Non, ça fait 3 semaines que je suis là."

A Lopigna, en hiver deux loisirs: la sieste et la battue aux sangliers.

Cette dernière et délicate occupation vaut à Lopigna, un village qui n'a pourtant pas besoin de ça pour révéler tout son potentiel esthétique (ou "inthestique" comme le disent certains érudits lopignais), d'être agrémenté par de très belles peaux de sangliers qui ornent les moindres murets ou clôtures. Le moment du dépeçage de la bête est l'occasion de perpétuer cette belle tradition qui est le crachat sur la vésicule. On ne sait pas trop pourquoi, mais on se doit de cracher sur la vésicule encore fumante du sanglier. Si vous posez la question à un chasseur lopignais, comme l'a fait ce journaliste de la chaine Seasons qui avait choisi Lopigna comme lieu de tournage (il s'était perdu ?), il vous répondra: "C'est comme ça."

Qui dit battue, dit chiens. A Lopigna (comme partout en Corse), les chiens sont sacrés, on n'y touche pas. Le vrai chasseur vous dira "çui-là qui touche au chien, y touche à moi." Qu'on se le tienne pour dit.

L'été, c'est le temps de la sieste et la baignade. Au village, quand on ne chasse pas, on se baigne et on refait le monde au bord de l'eau. Lopigna jouit de superbes coins de rivière figurant même dans le guide du routard. Et ça c'est embêtant. Parce que s'il y a bien une chose que le Lopignais déteste par dessus tout, c'est qu'on vienne troubler sa tranquillité. C'est vrai, quoi. Si le lopignais aimait la foule, il serait originaire de Lumio.

Si un corse dit à un lopignais que son village est beau, c'est qu'il est de Ponte-Leccia ou de Casamozza.

Que dire de plus sur ce village à part qu'on y fait une délicieuse charcuterie (celle de Gérard Taddei et Stéphane Leca), un délicieux fromage de chèvre au parfum vigoureux (celui de Jeannot Pieri) et que les merles moqueurs y sont succulents.

Mais Lopigna, c'est plus que tout cela. "C'est un de ces endroits privilégiés de Corse qui ont un caractère, une forte personnalité, que ni le temps ni les hommes n'arrivent à entamer."

C'est un des plus beaux villages du monde.

Mais pourquoi avoir ajouté cela, me demanderez-vous. Parce que les lopignais, "que l'on décrit comme individualistes — alliant l'exubérance à la maîtrise de soi — nonchalants, hospitaliers, loyaux, fidèles en amitié, attachés à leur village natal, éloquents et courageux, sont, eux aussi, plus que tout cela.

 Ils sont susceptibles…"

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03/04/2014

Ajaccio, Ajaccio (suite)

A l'heure où j'écris ces lignes, le Comité Central Bonapartiste a repris ses droits dans la ville impériale. Il est donc temps d'en parler plus amplement.

Qu'est-ce que le Comité Central Bonapartiste ? Le CCB est un parti politique ajaccien qui a pour vocation de célébrer la mémoire de l’empereur Napoléon 1er et de son action. Son hymne est la célèbre chanson de Tino Rossi (seconde célébrité locale) dont le titre est l'Ajaccienne. watch?v=aVMzsYGGv4M

Grâce aux membres du CCB, chaque rue d'Ajaccio, chaque institution, chaque monument, chaque troquet, porte un nom se rapportant à l'empereur, et sa glorieuse statue le représentant couronné de lauriers, à cheval, entouré de ses 4 frères, trône fièrement sur la place du Diamant. Parmi les lieux dédiés à sa personne, nous trouvons (liste non exhaustive): le cours Napoléon, la rue Bonaparte, la rue Fesch, la rue d'Iena, la rue Wagram, la rue Roi de Rome, le bd Madame Mère, le cours prince impérial, le cinéma l'Empire, le cinéma le Laetitia (l'Aiglon a fermé), le lycée Laetitia Bonaparte, le lycée Fesch, le musée Fesch, l'aéroport Napoléon Bonaparte, le bar le Wagram, le bar le Napoléon etc, etc... Grâce leur soit rendue.

Mais que se serait-il passé si Napoléon n'avait pas existé ?

Il y a fort à parier qu'on aurait eu, comme me l'a suggéré un ami, en plus du boulevard Tino Rossi, du port Tino Rossi, et du restaurant du Palais des congrès Tino Rossi, un aéroport Tino Rossi, un cours Tino Rossi, un lycée Ocatarinettabellatchitchi, un lycée Marinella, un collège Petit Papa Noël et une maison Rossi rue Rossi. Sans compter la statue Tino Rossi au Casone et celle de Tino Rossi sur un paquebot entouré de quatre marins à pompons sur la place du Diamant.

Quant au Comité central Bonapartiste, il se serait sans doute appelé Comité Central Rossiste.

Je me demande si je n'aurais pas préféré.

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19/03/2014

Ajaccio, Ajaccio

Actuellement, fleurissent à Ajaccio des résidences qui se veulent de grand standing dans des lieux improbables. Un concours de noms pompeux a dû être lancé, il ne peut en être autrement. Ainsi, sur la rocade, se construit "L'Opéra", vers les Padule, "Le Rembrandt", derrière Mezzavia, "La Villa d'Alexandrie". On s'attendrait à la limite, à trouver pareilles désignations vers les Sanguinaires ou Porticcio (Portitch pour nos amis continentaux) mais pas dans ces quartiers populaires d'Ajaccio. 

Comment ?! Discrimination ! Pourquoi ces lieux n'auraient pas le droit eux aussi à un nom prestigieux ? Je propose donc de rebaptiser Les Cannes, "Les Roseaux de Joséphine", Les Salines, "Le petit Guérande", les Padule deviendraient "Les Marécages Impériaux"... On pensait avoir usé jusqu'à la corde les noms liés à l'empereur, mais en grattant bien, on peut creuser encore. D'ailleurs je constate avec amertume qu'aucune rue ne porte encore le nom du cochon d'Inde de l'enfant prodigue de la gloire, qui s'appelait, si je ne m'abuse, Strapunta (littéralement "matelas") en hommage à son penchant atavique pour la sieste, ni de son chien, un magnifique Cursinu ébène (les plus rares) nommé Marius Trésor. (Un autre Marius Trésor, des années plus tard, donnera ses lettres de noblesse à l'équipe de football ajaccienne l'ACA. On peut d'ailleurs se demander si ses parents, les deux seuls bonapartistes guadeloupéens de l'Histoire, n'ont pas affublé leur enfant de ce nom en témoignage de leur admiration pour le meilleur ami de l'empereur.)

Amis lecteurs, si vous avez des suggestions pour les promoteurs immobiliers locaux, n'hésitez pas. Visiblement, ils sont à cours d'inspiration.

Quant à moi, je songe à baptiser mon domicile "Au rieur sanglier". Ah non, c'est déjà pris. Alors "la Closerie d'Euterpe". Ça en jette, non ?

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12:02 Publié dans Humour, La Corse | Tags : ajaccio | Lien permanent | Commentaires (2)