19/07/2014
Ils sont là.
On y a cru. On s'est dit, égoïstement, que peut-être, cet été, avec la grève de la SNCM, on aurait un peu de tranquillité sur nos rivages. Début juillet, on bénéficiait encore d'au moins 50 cm autour de notre serviette de plage. Fait exceptionnel ! Hélas, un accord trouvé, les bateaux reprenaient leur navigation, déversant des cohortes de touristes cramoisis de colère avant de l'être de chaleur. Ils étaient en retard. On était pénards.
Maintenant, il n'est plus possible de poser sa serviette sur le sable, plus possible de faire un saut rapide à la boulangerie située à 1 km pour acheter une baguette (une demi heure de trajet, une demi heure d'attente), plus possible d'aller passer une soirée agréable en terrasse. Partout, des humains. Beaucoup trop d'humains.
Enfin, je dis ça parce que je suis misanthrope. Surtout l'été. Il est donc temps pour moi de prendre un aller simple pour la Silésie orientale. Sur les bords de la Vistule, je pourrais peut-être piquer un petit roupillon.
Bonnes vacances à tous !
11:04 | Lien permanent | Commentaires (2)
14/07/2014
Chronique d'un 14 juillet ordinaire
14 juillet. Devant sa télé, René Champiot goûtait aux joies du défilé et du Tour, un verre de rosé à la main, son chat Léon Blum sur les genoux. Il avait bien mérité cette journée de détente, lui qui s'éreintait depuis près de 30 ans à l'atelier de montage des outils de jardinage Leborgne à Arvillard, en Savoie.
René Champiot était socialiste. En 81, il avait fêté la victoire de Mitterrand avec les copains de l'atelier, qui comme lui, espéraient un monde meilleur. Il y avait cru, René, au socialisme, et malgré les déceptions, les déconvenues, était toujours resté fidèle à son idéal de gauche. Pas une année ne s'était passée sans qu'il ne prenne sa carte du Parti, et pas une ne s'était écoulée, sans qu'il n'entonne pour l'anniversaire de la naissance de Léon Blum, "Changer la vie" à la section Ignacio Rodriguez, boulevard Antoine Rosset.
Dans sa jeunesse, René Champiot aurait pu se laisser aller au communisme, mais il était trop timoré pour cela, pas assez téméraire et surtout, un tantinet conservateur, bien qu'il s'en défendît. Il devint donc socialiste, et s’accommoda de la chose. Il arrivait parfois à cet homme pondéré d'avoir des bouffées révolutionnaires, des velléités de communard, mais cela ne durait pas.
Les enfants, partis vivre leur vie depuis longtemps, venaient déjeuner ce midi. Cela faisait plaisir à Geneviève, l'épouse de René, qui célébrait cette occasion par un immuable, mais non moins délicieux, tajine aux pruneaux. On en profita pour regarder l'interview télévisée du président Hollande, puisqu'on avait voté pour lui. Puis de nouveau le Tour de France. Les enfants prirent alors congé après avoir embrassé leurs parents.
Geneviève installée près de lui, René se passionna pour l'ascension du col du Galibier, vibrant au moment du sprint final mené par Germain Pinault, un coureur qu'il admirait.
Galvanisé par le discours enthousiaste de François Hollande et échauffé par l'époustouflante ascension du cycliste, René entreprit celle de sa femme. Une manœuvre aussi inhabituelle qu'inattendue (abandonnant toute frilosité, il avait essayé de forcer une entrée annexe) lui valu une paire de gifles retentissantes. Il s'en excusa maladroitement.
Le 14 juillet touchait à sa fin. Le soir, on admira le feu d'artifice tiré au dessus de l'horloge de la mairie, puis on esquissa quelques pas de danse, au bal des pompiers.
Demain 15 juillet, retour à l'atelier, pas de défilé, pas de discours, pas d'étape de montagne. Du plat, seulement du plat.
20:57 Publié dans Nouvelle | Tags : 14 juillet, tour de france, cyclisme, socialisme, léon blum, jardinage leborgne, ignacio rodriguez, arvillard | Lien permanent | Commentaires (5)
10/07/2014
Dans toute oeuvre de génie, chacun reconnaît une idée personnelle inaboutie.
Il a tout dit Goethe, tout résumé. L'idée, l'idée, cette maudite idée qui nous fait défaut et que quelqu'un, systématiquement, a eu avant nous. "Punaise ! Pourquoi n'y ai-je pas pensé avant ?" se dit-on parfois. (Bon, vous n'utilisez peut-être pas l'expression "punaise".)
Pourquoi n'ai-je pas pensé à écrire Harry Potter ? Le journal d'un dégonflé ? Oui-Oui et les 3 lutins ? (Je ne cite pas A la recherche du temps perdu, un peu d'humilité.) Jk Rowling, Jeff Kinney et Enyd Blyton ne retourneront pas dans leur salle de classe en septembre, eux. D'autant plus que seule JK Rowling était enseignante et qu'Enyd Blyton est morte.
Pourquoi est-ce qu'ils ont eu l'Idée et pas moi ? Peut-être parce que, dans leur cas, ce n'est pas qu'une question d'idée mais aussi de talent ?
Alors, ce serait ça l'explication ? Le talent ? Le travail aussi, je suppose. Et aussi le temps. Harry Potter ne s'est pas écrit en un jour. Le calme également. Des petits moments de tranquillité. Peut-être que tous ces gens n'écrivaient pas dans leur salon plein de cris d'enfants.
"Je me souviens de chaque baguette que j'ai vendue, Mr Potter, répondit-il. Or, Le phénix "MAMAN, T'AS PAS VU MON SHORT POUR LE TENNIS, LE NOIR ????" sur lequel a été prélevée la plume qui se trouve dans votre baguette a également fourni une autre plume à une autre baguette. Il est très étrange "MAMAN, TU L'AS RANGÉE OÙ MA ROBE BLEUE ???" que ce soit précisément cette baguette qui vous ait convenu, car sa sœur n'est autre que celle qui "PIPI !!!" ... qui vous a fait cette cicatrice au front."
C'est pas gagné.
L'idée, l'idée... j'en ai bien une d'idée, et peut-être même deux. Hélas, comme j'ai fait lettres modernes comme études, je n'ai pas les compétences nécessaires à leur application. Ça ne sert à rien d'avoir fait lettres modernes, à moins d'être un écrivain talentueux qui ne fera pas offense à la littérature, mais comme ce n'est pas mon cas, j'ai un blog. Un blog sur lequel quelques personnes (une soixantaine environ, merci à eux) vont faire un tour parfois, au gré des publications.
Écrire c'est effacer disait quelqu'un. Alors, on efface tout et on recommence ?
Et peut-être, un jour, au détour d'une phrase, l'Idée...
07:17 | Lien permanent | Commentaires (3)
02/07/2014
A 4 mains (mais sans les dents)
Fin juin 1983, avait lieu ma première audition de piano au théâtre de Bastia. J'avais 10 ans et demi. On m'avait extrait les canines peu de temps auparavant et mon récent passage chez le coiffeur s'était avéré désastreux.
Je crois me souvenir que j'avais interprété un morceau de Leopold Anton Koseluch.
Mon vieux professeur de piano (décédé il y a peu) Michel Costa, posait un regard bienveillant sur ses élèves, tandis que, souriant de toutes les dents que j'avais encore, je posais pour la postérité.
Ce soir-là, j'allais apprendre que pas une audition de piano ne se terminerait sans que M. Costa n'interprétât la Danse Hongroise de Brahms à 4 mains avec Thierry G. et que Guilaine R. (qui jouait merveilleusement bien et avait toutes ses dents) serait toujours mieux habillée et coiffée que moi.
Ce soir, c'est au tour de Romane, ma fille, (à qui on a ôté les canines il y a peu), de se fabriquer de jolis souvenirs.
11:57 Publié dans Nouvelle | Lien permanent | Commentaires (2)